les personnages allégoriques disparaissent pour faire place à des personnages réels, tels que le Mauvais riche et le Ladre, l’Enfant prodigue, la pauvre Villageoise, laquelle aima mieux avoir la tête coupée par son père que d’être violée par son seigneur. Quelques-unes de ces pièces sont exclusivement satiriques, telles, par exemple, que celles qui portent pour titre : de l’Evesque que l’Arcediacre murtrit pour estre evesque ; — d’un Pape qui par convoitise vendit le basme dont on servoit deux lampes dans la chapelle de S. Pierre, dont S. Pierre s’aparut à lui en lui disant qu’il seroit dampné. — D’autres sont politiques : le Jeu de Pierre de la Broche (Broce), chambellan de Philippe le Hardi, qui fut pendu le 30 juin 1278, lequel dispute à fortune par devant réson, et la moralité à sept personnaiges bien bonne, dont le premier est pouvre peuple. Cette pièce fait allusion aux troubles qui agitèrent la France dans les premières années du règne de Charles VIII. Les moralités, comme les mystères, sont écrites en vers, et le nombre des acteurs varie de deux à dix.
Les farces, qu’on distinguait en farces joyeuses, récréatives, historiques, facétieuses, enfarinées, ne se composaient guère de plus de cinq cents vers. « C’est dans ces petites pièces, dit M. Sainte-Beuve, qu’il faut surtout étudier l’esprit satirique et railleur de nos pères et leur penchant inné à présenter les ridicules et à fronder le pouvoir. » Par malheur, nos aïeux ne se bornèrent point à fronder le pouvoir, ils s’attaquèrent souvent aussi aux choses les plus respectables, et souillèrent par d’intolérables grossièretés des compositions dans lesquelles brille par éclairs une verve étincelante. Les farces furent surtout en vogue à la fin du quinzième siècle et dans le cours du seizième, et dans les titres seuls il y avait de quoi piquer la curiosité. C’était la farce des hommes qui font saler leurs femmes parce qu’elles sont trop douces, — la farce nouvelle et récréative du médecin qui guarist toutes sortes de maladies, aussi fait le nez d’une femme grosse, — la farce nouvelle d’un jeune moine et d’un vieil gendarme devant Cupidon pour une fille, etc.
La plus célèbre de ces pièces est la farce de maistre Pierre Patelin, que M. Sainte-Beuve appelle avec raison « un ad-