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ennemie, et dès ce moment le feu des Espagnols diminua.

L’amiral de chaque flotte était au poste le plus dangereux, en tête de ses vaisseaux : ils se trouvèrent vis-à-vis l’un de l’autre, le comte de Bossu à bord de sa formidable Inquisition, le vaillant Corneille Dieriksen sur son petit navire à deux mâts.

Ils s’accrochèrent avec une ardeur égale, quoiqu’avec des forces si disproportionnées. Les royalistes se tenaient couchés à plat ventre sur le pont de leur vaisseau jusqu’au moment de l’abordage, selon la coutume des marins : ils voulaient éviter ainsi le feu meurtrier de leurs adversaires. Mais les patriotes, animés d’un courage surnaturel, ne voulurent point prendre la même précaution. Ils auraient rougi de se baisser à la vue de leurs féroces ennemis : debout à la proue, la tête haute et le regard menaçant, ils écoutaient sans crainte siffler les balles mortelles.

Avant que les grappins fussent jetés, avant que les navires se heurtassent, vingt Hollandais étaient déjà sur le vaisseau du comte de Bossu. Ils s’étaient élancés de l’extrémité des vergues, ils s’étaient accrochés aux cordages, ils avaient franchi tous les obstacles pour joindre l’ennemi. Un moment après cent autres montaient à l’abordage, tandis que, du haut des hunes, d’habiles tireurs faisaient un feu continuel sur les royalistes.

Ils fondirent d’abord sur les soldats espagnols, qui soutinrent assez mal ce premier choc et reculèrent ; mais les Wallons et les gentilshommes flamands qui