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dont la légèreté égalait la grandeur, auraient pu suffire seuls à mettre en fuite le vingt flibots qui s’avançaient contre eux, si ces flibots n’eussent été montés par les plus intrépides des hommes.

L’escadre hollandaise s’approchait dans un profond silence. On n’entendait point de cris de guerre se mêler au bruit des vergues ébranlées et aux mugissements de l’artillerie. Les officiers et les matelots, appuyés sur leurs armes qu’ils serraient avec force, les yeux fixés sur les vaisseaux ennemis, attendaient l’instant du combat avec une impatience muette ; quoiqu’ils fussent à portée de canon des royalistes, ils ne tiraient point encore sur eux ; car ce n’était point dans leurs canons, mais dans leurs épées qu’ils avaient mis leur confiance.

Quand ils furent à cent pas de l’ennemi, une décharge des douze grands vaisseaux ébranla l’air et la mer. On vit des vergues abattues, des voiles déchirées, des cordages emportés ; le sang de plus d’un brave patriote coula : mais la flottille continua de s’avancer en bon ordre.

Plus d’une fois encore les royalistes firent feu avant que les Hollandais pussent les joindre. Leurs coups ne furent point sans effet ; cependant aucun des vingt flibots n’abandonna son rang.

Enfin on arriva à portée de pistolet. Alors seulement les Hollandais, présentant le travers, lâchèrent leur bordée. Elle fut terrible. Toutes les pièces, pointées avec sang froid par d’habiles canonniers, portèrent le ravage et la mort dans la flotte