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tourna l’arme meurtrière, et, déployant sa force prodigieuse, il obligea son antagoniste à reculer, tandis que Louis de Winchestre soutenait la jeune fille éperdue et se hâtait de la couvrir d’un grand manteau

— Voilà de belle besogne ! dit en frémissant de rage don Ignatio, que Dirk tenait comme enchaîné au fond de la cellule ; on va nous découvrir, et nous périrons avec elle.

— Au moins ne sera-ce pas sans vengeance ! reprit le pilote.

— Imprudent ! que ferons-nous contre une armée d’ennemis ? Ah ! Dirk Dirkensen, tu nous as perdus sans nécessité et sans fruit. Mais lâche-moi ; que crains-tu ? maintenant qu’elle est restée un seul moment auprès de nous, il est trop tard pour reculer.

— Avant que je ne te lâche, répliqua d’un ton décidé le vieux marin qui le tenait par le milieu du corps, promets-moi de nous seconder de ton mieux.

— Il le faudra bien, répondit tristement l’alguazil, car le même sort nous attend tous : nous échapperons ou nous périrons ensemble. Mais, par la barbe du prophète ! laisse-moi… On vient à nous ; cachez la fille de votre mieux, moi je porterai la parole.

— Si tu nous trahis…

— À quoi me servirait-il de vous trahir ? je serais soupçonné, et ici le soupçon est pire que la mort. Tâchez seulement de faire bonne contenance.

On mit à la hâte un masque noir, comme ceux que portaient quelquefois les familiers, sur la figure