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terné plus d’une heure devant l’autel du Très-Haut, il se croyait déjà certain d’obtenir un nouveau succès.

Le soleil n’était pas encore à son déclin quand il arriva à l’hôtel où il avait pris son logement ; mais, quoique l’heure fût si peu avancée, la maison retentissait de cris et de chants joyeux. C’était Dirk Dirkensen qui faisait fête à un ancien camarade : comme ils s’étaient précisément attablés dans l’appartement du jeune homme, il fut obligé de se rendre auprès d’eux, et il entra au moment où ils chantaient en chœur la victoire de Lépante.

Dirk parut troublé à la vue de son lieutenant, mais son convive ne se déconcerta point : c’était un homme de haute taille, vêtu de noir et armé d’une longue rapière. Sa figure brune et cicatrisée avait une expression singulière de hardiesse, de franchise et de férocité. Ses yeux noirs brillaient comme ceux d’un oiseau de proie, ses narines étaient hautes et larges comme celles des chasseurs indiens ; sa bouche, un peu grande, laissait entrevoir deux rangées de dents blanches et aiguës, de grosses moustaches, qui se relevaient en pointe de chaque côté, couvraient presque le tiers de son visage, et une large balafre dont sa joue gauche était sillonnée achevait de lui donner un air redoutable.

— Mon gentilhomme, dit-il en se levant pour saluer le nouveau venu, vous voyez devant vous don Ignatio-Angelico-Dominico-Francisco de Santa-Maria y Pedroval y Paulodor, actuellement bri-