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le courage d’approcher de ce prince aussi malheureux que coupable. — Calmez-vous, Sire, lui dit-elle d’un ton qui ne ressemblait point à celui du reproche ; Anne d’Autriche est sauvée.

— Sauvée ! répéta Philippe en reculant de surprise ; sauvée ! dites-vous ? et il passa la main devant ses yeux comme pour s’assurer s’il n’était point le jouet de quelque illusion : vous vivez, madame ! et par quel miracle ?

— Ce jeune homme m’a défendue, répondit la princesse en montrant Louis de Winchestre.

Le Roi tourna vers le Belge ses yeux ternes et semblables à ceux d’un mourant : il parut l’examiner, et bientôt sa pâleur fit place à une rougeur brûlante, ses yeux reprirent leur éclat, et une violente jalousie se peignit dans tous les traits de sa-figure.

— Un jeune homme ! murmura-t-il : qu’on s’assure de lui !

— Arrêtez, Sire, s’écria la Reine ; c’est mon libérateur, et ma mort suivrait de près la sienne…

— Au moins, madame, reprit le monarque avec un regard soupçonneux, vous ne refuserez pas de me dire comment ce jeune homme s’est trouvé présent…

La princesse restait muette. — Sire, dit Louis de Winchestre avec une fermeté mâle et digne d’un héros, je suis prêt à satisfaire Votre Majesté ; mais j’ose vous supplier que ce soit dans un autre appartement, et qu’on s’occupe en attendant de secourir la Reine.