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cherché à effrayer la Reine et à lui extorquer quelques aveux, on lui laisserait la vie et la liberté. Enflammé d’une vertueuse indignation, mais craignant de compromettre la princesse en se montrant, il restait immobile, frémissant de colère, tenant à deux mains son épée, dont, dans son impatience, il mordait avec force le pommeau ; mais quand il entendit ces paroles sinistres : il faut mourir ! quand il vit l’officier appeler du geste le bourreau qui le suivait, et déjà étendre la main pour saisir la Reine, il poussa un cri de fureur et fondit le glaive nu sur les meurtriers, en répétant : il faut mourir ; oui, misérables, il faut mourir.

Les regards seuls de l’officier et de son infâme aide révélèrent leur surprise et leur terreur : avant que leurs traits eussent pu changer d’expression, avant que leurs joues fussent décolorées, avant qu’ils eussent quitté leur attitude menaçante, le fer vengeur les avait atteints tous deux : le glaive de Louis de Winchestre fendit le casque et ouvrit le crâne du militaire, et, d’un coup de pointe, il perça le cœur du bourreau.

À la vue du sang qui coulait en abondance, cette princesse qui venait de soutenir avec tant de courage les approches de la mort, saisie maintenant d’une horreur profonde, détourna la tête, s’appuya sur le prie-Dieu, et resta un moment sans connaissance ; ses femmes ne firent pas un seul pas pour la secourir : accoutumées à demeurer passives au milieu des scènes affreuses qui se renouvelaient si