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verser son sang pour la religion ! Au moins toute l’Europe sait que je n’épargne pas celui de mes troupes, quand il y va de l’intérêt de Dieu.

Le moine répondit d’un air de persuasion : Aussi Votre Majesté est-elle particulièrement agréable aux bienheureux, dont l’intercession est toute-puissante. C’est pour révéler une grande preuve de cette vérité, que j’ai quitté les pays lointains où le général de notre sainte religion m’avait nommé commissaire général et que j’ai osé comparaître, moi indigne, devant un prince qui est le bouclier de l’Église et le lieutenant du Très-Haut sur la terre.

— Vous nous comblez de joie, digne père Lucas, en nous favorisant de votre présence, et nous pensons que le plus grand roi du monde est à peine digne de nouer les cordons des sandales d’un saint religieux comme vous. Mais reprenez votre récit.

— Nous avions pour provincial dans les Indes, reprit le moine d’une voix moins assurée, le père Gonzalez de Nundel, homme d’une vie austère et d’une piété éminente ; le Ciel l’ayant favorisé d’une vision toute miraculeuse, j’ai cru de mon devoir d’en faire rapport à Votre Majesté. Mais j’ignore s’il serait agréable à un aussi grand prince d’être informé devant tant de personnes d’une chose qui le concerne spécialement.

— Parlez, mon bon père, nous brûlons de vous entendre.

— Je dirai donc à Votre Majesté que notre révérend provincial dans les Indes, Gonzalez de Nundel,