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respecté les soldats luthériens de Guillaume de Nassau, les Espagnols se répandirent dans les maisons, et y commirent tous les excès auxquels est exposée une ville prise d’assaut. Alors on n’entendit que des cris et des gémissements, et les deux dames, saisies d’horreur, se prosternèrent contre terre, remerciant Dieu d’avoir échappé au désastre épouvantable dont elles étaient témoins.

Après une journée d’angoisses et d’horreur, elles furent délivrées, au commencement de la nuit, par le jeune mulâtre. Il les fit sortir du souterrain et les conduisit par des rues détournées jusqu’à une des portes de la ville, où commandait un officier dont il était sûr. Elles prirent ensuite le chemin d’Anvers, au milieu d’une obscurité profonde. Mais à peine avaient-elles marché pendant près d’une heure, qu’une bande de soldats ivres et furieux se trouva sur leur passage. Le mulâtre mit l’épée à la main, mais que pouvait-il seul contre tous ! Après des prodiges de valeur, il tomba percé de plusieurs coups et fut laissé pour mort. Déjà les Espagnols saisissaient les deux fugitives, déjà ils les avaient séparées et se disputaient le droit affreux d’outrager le premier leurs prisonnières, quand deux hommes à cheval, fondant sur eux avec la rapidité de la foudre, écrasèrent les plus hardis et mirent le reste en fuite.