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devant mon tribunal, et que je ne puis m’absenter sans porter un notable préjudice aux soixante mille accusés et à l’État.

— Je vous comprends, répondit le duc en lui jetant un regard sévère, je vous comprends parfaitement. Puis, se tournant vers le conseiller de Rhoda : Ce sera donc vous, seigneur Hieronymo, qui irez recevoir ces brillantes récompenses.

— J’y ferai de mon mieux, monseigneur, répartit le rusé Espagnol. Tout ce qui m’afflige, c’est que la faiblesse de ma santé ne me permettra peut-être pas de voyager aussi rapidement que je le désirerais.

No es nada, dit le gouverneur.

— Peut-être, reprit le conseiller, ne pourrai-je arriver à Madrid.

— Vous essaierez du moins, répliqua le duc, et si vous tombez malade en chemin, Albernot, qui vous accompagnera, poursuivra seul le voyage.

Ce fut alors le secrétaire qui trembla. C’était s’exposer aux plus effroyables supplices que de porter à Philippe II un pareil message, et il n’avait aucune excuse à alléguer. Pâle de crainte, le cœur serré et la sueur au front, il répondit en balbutiant : Je serai trop… trop heureux… que Votre Excellence me confie… une mission si…

— Dites : si dangereuse, Albernot, puisque telle est votre pensée, répartit le duc avec un coup d’œil foudroyant. Mais ne craignez pas que Ferdinand de Tolède accepte les services d’un agent si timide ;