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mériter quelque gloire et de bien servir mon pays.

Le duc d’Albe vit l’hésitation du jeune homme : il devina sa faiblesse, et ses inquiétudes cessèrent. — Certes, reprit-il d’un air assuré, je serais ennemi de ma patrie et de vous-même, don Juan, si dans un moment si difficile je remettais le pouvoir entre vos mains. Votre sagesse, je veux le croire, est au-dessus de votre âge ; mais croyez-vous pouvoir, dans un pays inconnu, lutter contre un guerrier plein d’expérience et fécond en ruses comme le prince d’Orange ? Vous imaginez-vous qu’un homme que je n’ai vaincu qu’à force de stratagèmes, d’adresse et de prudence, cède à votre fougue et à votre impétuosité ?

— Seigneur, répliqua le duc de Médina-Cœli quand son émotion lui permit enfin de prendre la parole, j’ignore quelles seront les conséquences de la faveur que le Roi m’a accordée, mais je suis déterminé à encourir la chance. Voici les lettres royales, ajouta-t-il en tirant de son sein un paquet scellé du grand sceau de la monarchie ; vous y trouverez l’expression de la volonté de notre souverain reste à vous et à moi qu’à nous y conformer.

Ferdinand de Tolède prit le paquet d’un air indifférent, et, le donnant à son secrétaire : Albernot, dit-il, vous aurez soin de me mettre ces papiers sous les yeux… demain… après-demain… ou quand les affaires de Flandre me laisseront un moment de repos. Pour vous, monsieur le duc, soyez bien convaincu que rien ne me ferait renoncer à une résolution que j’ai prise dans l’intérêt seulement de l’État.