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de la salle. Ils se saluèrent tous deux, et tous deux se recouvrirent aussitôt : puis don Juan de la Cerda prit la parole, et, avec une politesse exquise, il exprima son estime et son admiration pour le grand capitaine en présence duquel il se trouvait.

Ferdinand de Tolède l’écoutait en souriant : ses regards, attachés sur le jeune duc, semblaient scruter ses pensées, quoiqu’il s’efforçât de prendre un air riant, ses sourcils épais s’étaient abaissés sur ses yeux, ses narines se gonflaient et une ride se dessinait sur son front hautain.

Cependant il répondit avec une sorte de courtoisie au compliment du duc de Médina-Cœli ; mais le ton de sa voix changea, ses joues pâlirent et ses yeux étincelèrent quand, après quelques vaines politesses, il demanda enfin à celui qui venait lui succéder quels motifs, à lui inconnus, l’amenaient dans les Pays-Bas.

Cette question surprit toute l’assemblée, et ceux qui connaissaient le féroce Espagnol jugèrent aussitôt qu’il n’était guère disposé à reconnaître son successeur. Cependant ils se rassurèrent en songeant que, le duc de Médina-Cœli ayant sans doute avec lui le brevet de sa nomination, son rival serait contraint d’obéir aux ordres du Roi.

Don Juan de la Cerda avait partagé l’étonnement général. Il répondit d’une voix qui trahissait son agitation : Je suis venu, grand capitaine, me charger d’un fardeau dont vous avez demandé qu’on vous délivrât, et essayer, en marchant sur vos traces, de