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parvis de la chapelle et sur la tombe de mes aïeux me remplirent d’horreur et de compassion. J’interrogeai les soldats : ils me répondirent par des menaces… Ô mon père ! J’étais aussi un Gruthuysen et j’avais une épée…

» Quelques jours après je revins à Bruges : je fus repoussé par vous et par Marguerite… J’aurais dû me soumettre, et subir vos reproches en silence… Je fus coupable, je vous quittai dans l’horrible dessein de ne plus vous revoir.

» Un navire marchand me porta dans les régions sauvages du nouveau monde. Là je voulais vivre loin des hommes civilisés et de l’oppression ; mais là aussi je retrouvai les Espagnols.

» Attaquant des tribus paisibles auprès desquelles je voulais choisir mon asile, ils surprirent leurs guerriers, enlevèrent les femmes et les enfants, et les traînèrent au fond des mines où ils achètent l’or au prix du sang de leurs esclaves. Des chiens énormes, qui les accompagnaient, étaient dressés à dévorer les hommes. Les valets et les femmes perdues qui suivaient leurs troupes, plus cruels que ces féroces animaux, égorgeaient les pauvres indiens, sans motif et sans avantage. Leurs moines,… grand Dieu, quels tigres que leurs moines ! ils prêchaient le massacre au nom de l’évangile, et teignaient dans le sang l’emblème de la miséricorde céleste.

» Ô mon père ! quand je punis ces lâches meurtriers ; quand, m’unissant pour une juste vengeance aux braves qui avaient échappé à leurs coups, j’exter-