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Quant aux signes qui commencent les deux séries, il est naturel d'y voir des centaines, bien qu'ils aient peu d'analogie avec le signe qui, dans l'inscription de Marseille1604 et sur les monnaies, indique cent. Dans une ancienne numération qu'un habile orientaliste hollandais, W. Land, a trouvée dans des manuscrits syriaques du VIe siècle, et dont il a bien voulu me communiquer les formes1605, le signe pour les centaines a une forme qui se rapproche assez de la nôtre. Les deux signes dont nous parlons se ressemblent dans les deux séries; ils ont cependant dans le haut une sensible différence: l'um a deux cornes ou aigrettes, l'autre n'en a qu'une.


M. de Rougé, conduit à cette supposition par des analogies tirées des chiffres hiératiques, me suggéra l'idée que l'un de ces chiffres pouvait désigner 100, l'autre 200. Les chiffres démotiques présentent la même particularité1606. Mais nous verrons bientôt que celle hypothèse n'est guère soutenable, et que selon toutes les apparences les deux chiffres qui ouvrent les deux séries ont la même valeur et valent 100. Le point qui les précède est probablement le signe d'unité, que la numération sémitique a coutume de donner pour cœfficient aux centaines. D'ordinaire cependant, ce cœfficient est marqué par une barre1607


Les huit lettres qui suivent la première série de chiffres donnent ### “au seigneur des rois”, ou “du seigneur des rois”, en prenant le ל comme une sorte de lamed auctoris, analogue à celui qu'on trouve sur les légendes des monnaies. L'expression ### se retrouve dans l'inscription d'Eschmunazar, où elle parut d'abord désigner le Dieu suprême. Rapportée à la Divinité, elle n'offre ici aucun sens. D'ailleurs, une inscription de Chypre, découverte par M. de Vogüé à Larnax-Lapithou, appelle expressément Ptolémée Soter ###1608. La suite de notre inscription oblige à voir dans ces deux mots ### l'indication de l'ère d'après laquelle la date est donnée. "Le seigneur des rois”, semble ne pouvoir être qu'Alexandre.


Mais il ne faut pas se dissimuler ce qu'une telle expression a de bizarre. Je fus d'abord tenté de croire que le premier jouait ici un double rôle, et qu'il fallait lire: ### “de l'ère des seigneurs rois”. L'inscription de Larnax-Lapithou offre pour ce même mot une