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— « Depuis que le valet est parti, je fais tout dans la maison, dit-elle. Surtout depuis qu’on est seule, nous deux madame, la cuisinière couche en ville. C’est maintenant qu’on s’amuserait bien avec monsieur Daniel, libres comme on est, que je disais à madame l’autre jour. »

— « Ma petit Thérèse, je vous en supplie, allez chercher la voiture. » Et Daniel regagne le salon bleu.

« Maintenant qu’on est seules nous deux madame, songe-t-il, il y a un ton de cataclysme dans la maison. »

— « Eh bien, dit Germaine, cette voiture ? Vous faisiez la cour à Thérèse.

— « Monsieur, vous êtes trop aimable, dit on ne sait pourquoi la marquise, mais j’habite le Ritz et mon chauffeur… »

Personne n’écoute, Germaine et Daniel se font des signes dans son dos et se sourient longuement. Germaine la conduit dans l’antichambre.

Thérèse tient la porte, Daniel seul dans le salon met un disque éraillé au phonographe, cette musique de bastringue fait revivre le passé et Germaine, dans sa douce petite robe noire, revient sur un pas de fox-trot.

— « Enfin seuls ! crie-t-elle. Thérèse, j’ai faim. »

— « Mais, madame vient de dîner et avec la marquise, encore », dit Thérèse raisonnable.

— « Cela m’est bien égal, tu crois que je mange, ma fille, quand j’ai cette vieille amie à mes côtés. Daniel aussi a faim, j’en suis sûre. Il a toujours faim d’abord, quand il vient ici. Soupons. »

— « Mais il n’y a rien, madame la comtesse. »

— « Ah, laisse-moi tranquille, dit Germaine, cherche. »

Elle s’étend sur le divan, tandis que Thérèse va fouiller les placards.