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DEUXIÈME PARTIE



Séparation

I

Daniel doit, chaque soir, partir pour l’Auvergne.

Le docteur lui a ordonné la cure des sapins, des hauts sommets, la vie régulière des hôtels, le repos d’une ville où il sera seul.

Chaque jour, il retourne chez Germaine.

Thérèse met de l’ordre, en attendant que sa maîtresse l’appelle à Venise, les fenêtres sont ouvertes car il fait chaud, et les stores baissés font de grandes ombres fraîches aux trottoirs.

Daniel s’attarde des heures entières dans la chambre, devant le sommier nu du lit, les couvertures pliées, pleines de camphre. Il fouille la coiffeuse où traînent encore de vieux tubes de rouge, des pompons imprégnés de poudre, des épingles.

Il rêve et se désespère devant ces misérables souvenirs, comme ceux qui, revenant du cimetière après l’enterrement banal, ouvrent, pour la première fois, la chambre du mort et trouvent sur une chaise, parmi les fleurs et l’odeur de cire, le dernier vêtement qu’il avait porté.

On ne croit pas à son malheur, mais tenace il s’impose, en répétant toujours la même chose, toujours la même chose, comme ces gouttes