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Scène IV

LES FEMMES, LA MÈRE CATHIARD, LOUIS THIEUX, puis MADELEINE
Les femmes arrivent successivement. Elles entrent dans la cour, les unes seules, les autres avec des enfants qu’elles tiennent par la main. D’autres portent des nouveau-nés dans leurs bras. Quelques-unes reconnaissent, parmi les cadavres, leur mari, leur fils, leur père. Cris, lamentations. Elles s’agenouillent près des cadavres et sanglotent.
Entre la mère Cathiard, soutenant Louis Thieux. Elle regarde d’abord autour d’elle. Louis Thieux semble tout à fait un vieillard. Il est courbé, peut à peine marcher, et ses yeux sont étrangement lointains.


La Mère Cathiard

Tiens… voilà un banc… tu es fatigué… tu vas t’asseoir là… en m’attendant…

Elle conduit Thieux au banc, sur lequel est assise une vieille femme, morne, silencieuse et qui attend, elle aussi.

Louis Thieux, en marchant.

Qu’est-ce que tu dis ?… Est-ce que nous allons à l’usine ?…

La Mère Cathiard, elle le fait asseoir sur le banc, près de la femme.

Surveillez-le… Il a la tête partie, le pauvre bonhomme… Je ne pouvais pas pourtant le laisser seul à la maison… (Regardant autour d’elle.) Mon Dieu… mon Dieu !… Si c’est possible, tout ça !…

La femme n’a pas bougé. La mère Cathiard se dirige sous le hangar.

Louis Thieux, ne parlant à personne.

Qu’est-ce que tu dis ?… (Regardant, lui aussi, vaguement ce