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Maigret, hochant la tête.

Des choses justes !… Jean Roule !… ça m’étonnerait !…

Hargand

Ils veulent vivre !… ça n’est pourtant pas un crime !…

Maigret

Ah ! vous voilà repris de vos scrupules ! Vraiment, ça n’est pas l’heure, monsieur !… Rappelez votre sang-froid… votre énergie !… Nous en avons besoin pour éviter de plus grands malheurs, encore !… Si vous vous laissez abattre par des chimères… que voulez-vous que nous fassions !… Ah ! parbleu ! Vous n’avez pas voulu m’écouter… Voilà trois jours que vous ne vous couchez pas… que vous vous tuez au travail !… Quelle que soit la force d’un homme, elle a des limites… et quand le corps est à bout… l’âme ne vaut guère mieux… Si vous vous étiez reposé, comme vous le deviez… rien de tout cela ne serait arrivé… Je me repose bien, moi, et je dors chaque nuit !… Sans cela… il y a longtemps que je serais sur le flanc… et que je divaguerais comme une femme !…

Hargand

Mais, mon fils, Maigret !… mon fils !…

À ce moment, du dehors arrive le bruit d’une sonnerie de trompettes, encore lointaine. Maigret et Hargand se regardent et ils écoutent… Les sonneries deviennent plus claires.

Maigret

Ce sont les troupes !… Enfin !

Il va vers la fenêtre.
Hargand, dans un grand geste accablé.

Déjà !

Sonneries. Rideau.