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Robert, découragé.

Pourquoi m’insultez-vous ?…

Jean

Parbleu !… c’est assez clair… Il y a du mécontentement parmi nous ; malgré notre résignation, notre lassitude, notre abrutissement, demain, peut-être… c’est la grève… Oh ! votre père est assez riche pour tenir le coup… et la grève n’est dangereuse, le plus souvent, que pour nous autres, qui finissons par en payer les frais… avec plus de servitude et de misère, toujours, et quelquefois avec notre sang… c’est entendu… Oui, mais enfin, c’est aussi l’inconnu… On tremble tout de même, pour ses usines, pour sa fortune, ou simplement pour ses bénéfices… Alors, on a compté sur votre popularité… on a calculé que votre présence remettrait les choses dans l’ordre… Et vous êtes accouru !… Jolie besogne…

Robert

Pourquoi m’insultez-vous ? Je viens à vous la main tendue, et le cœur fraternel… Ah ! je vous le jure… Et vous m’insultez !… Vous vous croyez un homme libre, et vous ne savez pas, et vous ne voulez pas vous élever au-dessus des préjugés de l’ignorant, et des basses rancunes du sectaire.

Jean, un peu calmé.

Soit !… Je me suis trompé… Et vous êtes, peut-être, un brave garçon… Je ne vous connais pas… je ne sais pas… je ne sais rien…

Robert

Alors ?…