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VIEUX MÉNAGE


Le théâtre représente la terrasse d’une maison de campagne dans les environs de Paris. Sur la terrasse, une table de jardin, des fauteuils d’osier, des fauteuils américains, chaises et pliants.
Au lever du rideau, la femme, conduite et soutenue par sa camériste, descend le perron de la maison et marche, péniblement, en soufflant, en criant, vers la table. Le mari vient derrière qui porte, sur son bras, des couvertures de laine chaude. La femme est tout entière enveloppée d’un manteau. Son visage disparaît sous les plis d’une dentelle blanche. Bien qu’elle soit aidée par la femme de chambre, elle s’appuie, lourdement, à chaque pas qu’elle fait, sur une canne à béquille. De temps en temps, elle s’arrête et se plaint.
C’est le soir, après le dîner, un soir d’été qui tombe, silencieux, calme et très clair, sur le jardin, dont les massifs, sur le ciel pur, sans nuages, s’assombrissent. Les fenêtres du rez-de-chaussée de la maison sont éclairées par une lumière rouge.



Scène première

LA FEMME, LE MARI, LA FEMME DE CHAMBRE
La Femme, à la femme de chambre.

Pas si vite… pas si fort… Vous me faites mal… Comme vous êtes brusque, mon Dieu !… Mais faites donc attention…

La Femme de chambre, la voix brève.

C’est à peine si je touche Madame… On ne sait jamais, comment faire avec Madame…

La Femme

Vous allez… vous allez… Laissez-moi un peu respi-