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ACTE PREMIER


Le théâtre représente les jardins du château de Vauperdu.
À droite, un perron monumental, orné de torchères dorées, conduit au château qu’on ne voit pas, mais qu’on devine, face au fond de la scène. Au bas du perron qui descend face à la salle d’un côté, un énorme massif de rosiers ; de l’autre, un bouquet d’arbustes en fleurs. À gauche et au fond, le parc, un immense parc à la française, déploie la magnificence de ses pelouses fleuries, de ses bassins, de ses terrasses ornées d’ifs taillés et de balustrades de marbre… À gauche encore, dans l’ombre d’un grand arbre, se dresse une gaine ouvragée, au haut de laquelle ricane un faune de marbre verdi. Les larges avenues enfoncent, au loin, leurs perspectives rectilignes, ensoleillées et foudroyantes. Par leur trouée, on voit la plaine, les champs, les coteaux boisés… Décor somptueux.
Au lever du rideau, Mme Lechat est assise, emmitouflée de dentelles, dans un grand fauteuil d’osier, bourré de coussins… Elle tricote, de larges lunettes rondes sur les yeux… Près d’elle, à portée de sa main, une table sur laquelle repose sa corbeille à ouvrage… Grosse femme, figure blanchâtre, molle et vulgaire, en toilette trop riche. À sa gauche, sa fille Germaine est étendue sur une sorte de chaise longue de jardin, un livre ouvert sur les genoux… Elle songe, le regard au-delà des jardins, vers la campagne… Vingt-cinq ans, le corps souple, des yeux tristes et ardents. Très jolie, dans une toilette très simple, presque négligée…
Çà et là, tables et sièges de jardin…
Fin d’une belle journée de septembre.



Scène première


Mme  LECHAT, GERMAINE, puis UN VALET DE PIED
MADAME LECHAT, sans lever les yeux de son ouvrage.

Germaine !…