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vous déclarer ceci… Ma conviction est que ce que l’on poursuit en notre collègue Barbaroux, ce ne sont pas ses viandes corrompues, mais bien ses opinions avancées… Comprenez-vous ? (Approbations et rires.) Mais, certainement.

LE MAIRE

C’est peut-être aller un peu loin, mon cher docteur.

LE DOCTEUR TRICEPS

Nullement… En ma qualité de médecin et de savant, je sais ce que je dis… et vous m’accorderez que ces questions me sont familières… Eh bien !… je dis que tout cela est singulièrement arbitraire et antiscientifique au premier chef… D’abord les viandes pourries…

PREMIER CONSEILLER

En avez-vous mangé ?

LE DOCTEUR TRICEPS

Parfaitement… Et vous voyez que je ne m’en porte pas plus mal… (Se tapant la poitrine.) Le coffre est bon.

UNE VOIX

Bravo !

LE DOCTEUR TRICEPS

Il faudrait pourtant s’entendre une bonne fois… Non seulement je ne crois pas à la nocuité de la pourriture : je lui crois au contraire des propriétés stomachiques de premier ordre… oui… oui… comprenez-vous ? D’ailleurs, pourquoi la pourriture est-elle reconnue louable chez la bécasse et criminelle chez le bœuf ? C’est idiot… Toutes les pourritures doivent être égales devant la loi.