Page:Mirbeau - Théâtre I.djvu/205

Cette page a été validée par deux contributeurs.

ISIDORE

Implacable ?… Vous m’étonnez, monsieur le marquis… Les convictions sont quelquefois implacables… Et encore !… Les affaires, jamais… Et quand même ?… (Il se lève et marche dans la pièce avec animation.)… Croyez-vous donc que ma candidature socialiste, anti-cléricale, ne sera pas plus agréable à l’Église que celle de votre ami, le duc de Maugis, avec ses appels au miracle… ses invocations à la Vierge et aux saints ?…

LE MARQUIS, ironique.

Le point de vue est nouveau…

ISIDORE

Il est éternel, monsieur le marquis… Que représente-t-il, le duc ?… Voulez-vous me le dire ?… Du passé, c’est-à-dire de la poussière… de la matière inerte… du poids mort… L’Église… l’Église ?… Mais l’Église en a assez de toujours traîner à sa remorque une noblesse découronnée de ses vieux prestiges… volontairement immobilisée dans ses préjugés de la caste et dans ses routines de l’honneur… qui n’est mêlée à rien de ce qui vit et de ce qui crée… une noblesse qui, peu à peu, s’est laissé, stupidement, dépouiller de ses terres, de ses châteaux… de ses influences… de son action… et qui… au lieu de servir l’Église, la dessert, chaque jour, davantage, par son impopularité et sa faiblesse…

LE MARQUIS, riant discrètement.

Ah ! ah ! ah !…

ISIDORE

Mais oui, monsieur le marquis… c’est comme ça !…