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leur affaire… Mais qu’elles vagabondent sur les routes, sur les berges, libres… voilà qui est abusif… Dans un pays fermement républicain, on devrait au moins rendre les vaches inoffensives, les attacher, les museler !… (Regardant les vaches qui paissent le gazon abrouti de la berge)… Est-ce qu’elles ne vont pas s’en aller ?… Et n’est-ce pas une honte que des vaches si grosses, si dangereuses, des vaches peut-être enragées, soient conduites par une fille, si petite ? (Les vaches s’éloignent)… J’aime mieux ça !… qu’elles s’en aillent loin !… C’est vrai, aussi, avez-vous remarqué ?… Il est rare qu’on puisse goûter tranquillement, dans la campagne, la joie d’une conversation sérieuse… Où en étions-nous ?

Deuxième bourgeois (rassuré et suivant de l’œil les vaches qui s’éloignent).

Nous en étions au relèvement de la France !…

Premier bourgeois

Ah ! oui !… Et qu’on ose en nier les résultats, c’est, si je puis m’exprimer ainsi, une extraordinaire impudeur !

Deuxième bourgeois

C’est de la mauvaise foi, tout simplement !

Premier bourgeois

Monsieur Carnot à Nancy… M. Frédéric Febvre à Bâle ! Quels enthousiasmes ! quels triomphes !