Alors pourquoi cet acharnement contre sa misérable carcasse ? Obligeant envers tout le monde, adroit, courageux, il aimait à rendre service, à faire plaisir aux autres. On le trouvait prêt à donner un coup de main, pour n’importe quelle besogne. Il suffisait qu’on l’appelât : « Allons, viens ici, bossu, » pour qu’il accourût, heureux de se dévouer, de se montrer utile et bienfaisant. Sébastien s’arrêtait, avec une pitié immense, sur cette bonté touchante de François Pinchard, l’exagérait, la magnifiait, la sanctifiait, et par une irrésistible transposition de l’égoïsme humain, la faisait sienne, comme il faisait siennes aussi les souffrances du petit bossu, au point de se confondre avec lui, de se vivre en lui. Et les souvenirs émouvants reprenaient leurs cours. C’est ainsi qu’un dimanche, Coudray, le charpentier, sorte de géant bellâtre, l’avait battu sans raison, pour rire, pour amuser les jolies filles, car elles aimaient qu’on inventât des farces cruelles, qui le faisaient pleurer. Il était si drôle, sa bosse avait des sursauts si comiques, lorsqu’il pleurait : « Hé là, donc, Mayeux ! » Et le gros poing du charpentier, habitué à équarrir d’énormes troncs de chêne, s’était abattu à plusieurs reprises sur la bosse du bossu. « Sacré Mayeux ! Hé, là ! » Pinchard s’était secoué, ainsi qu’un chien que son maître a corrigé, et, plus étonné de la folie de cette agression, qu’indigné des coups reçus, il avait dit, en frottant la place endolorie :
— Pourquoi que tu m’bats ?… Tu n’serais seulement pas capable d’m’dire pourquoi qu’tu m’bats… Na !… Na !… C’est malin !
Et puis, on l’avait trouvé pendu, un matin, dans