dégoûtante infirmité, ne lui avait pas, soudainement, poussé sur le corps. Ensuite il considéra, de son œil doux effaré, le hardi camarade dont l’évidente majesté l’éblouit. Cette casquette, crânement posée, en arrière de la tête, sur la nuque, ces gestes délibérés, ce visage insolent, pâle et fin, aux grâces souples et douteuses de courtisane et, par-dessus tout cela, ces habits seyants et frivoles, lui apparurent comme la révélation de quelque chose de très grand, de sacré, d’inaccessible, à quoi il n’avait pas encore songé jusqu’ici. Sébastien fut véritablement écrasé de tant de prestige, et, par contre, il acquit, sur l’heure, la certitude de son indignité. À n’en pouvoir douter, il était devant l’un de ces êtres supérieurs, augustes, dont son père parlait avec tant de respect et d’émerveillement. Ce petit personnage, de toute évidence, n’était point comme lui-même, bâti de chair vulgaire et d’os grossiers, mais de matières précieuses, plus précieuses que l’or et l’argent. Il se dit : « C’est peut-être un fils de prince. » Ce fut un moment de douloureux émoi. Sous ses vêtements, antiques hardes, godantes défroques de famille, sommairement retaillées, retapées par la mère Cébron, et qui lui pesaient aux épaules, plus lourdes que des chapes de plomb, il se jugea si gauche, si infime, tellement déchu, qu’il eût voulu disparaître au fond de quelque trou, ou s’évaporer dans l’air, comme une fumée. Pourtant, avec l’intention vague de se réhabiliter, il bégaya, en un mouvement comique des lèvres :
— J’suis d’Pervenchères… dans l’Orne… J’suis d’Pervenchères…