Vierge ! répondait évasivement le Père de Kern.
Et, caressant son élève, de ses mains blanches, aux doigts souples et longs, il ajoutait :
— Si vous continuez à être bien gentil, je vous apprendrai des choses plus belles encore…
Ces conversations avaient lieu dans la cour, pendant les récréations ; aux promenades, durant les haltes sur les grèves ensoleillées, ou sous l’ombre des bois de pins ; et, chaque soir, après le coucher des élèves, dans l’embrasure d’une fenêtre ouverte du dortoir, où, tous les deux, ils restaient jusqu’à la nuit tombée, le Père parlant à voix basse, lui, écoutant, ravi. On était au mois de juin. Les soirs évaporaient, à travers le crépuscule, leur rêve charmant ; des odeurs montaient des jardins, des prairies, des bois, vagabondes et légères, et, derrière les massifs assombris du parc qui, lentement s’anuitait, le soleil, disparu, ne laissait de ses flammes de soufre et de pourpre, que de toutes petites nuées mauves, moirées d’or, se fondant une à une, en l’immense espace qui s’étoilait.
Alors Sébastien rentrait en sa cellule, un peu énervé de ces récits, la tête meurtrie par ce continuel fracas d’images enfiévrées et de verbes révélateurs. Le crâne brûlant, il demeurait de longues minutes avant de s’endormir, repassant en sa mémoire ce qu’il avait entendu et appris, s’efforçant de reconstituer la triomphale beauté de ces hommes plus beaux que des dieux, l’inconcevable splendeur de ces choses, plus splendides que les rêves. Son esprit, surexcité par les galops de son pouls, s’envolait vers des pays lointains, vers d’incertaines époques ; il se voyait acclamé par des foules parées et fleuries ; ou bien, juché au haut