Page:Mirbeau - Lettres de ma chaumière.djvu/26

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

moi, je cherche les couverts, les petites routes touffues, les sentes enverdurées. Il est sept heures.

Il n’y a pas si longtemps, les paysans, qui se couchaient avec le soleil, se levaient aussi avec lui. Aujourd’hui, en plein été et en pleine moisson, ils ne se lèvent guère qu’à sept heures, les paupières encore bouffies de sommeil, les membres las, comme brisés par des nuits de plaisir. C’est vers sept heures, que la vie revient, mais une vie lourde, inquiète, où l’on dirait qu’il y a des remords et des effarements. On les voit, les paysans, sortir lentement de leurs demeures paresseuses qui s’ouvrent à regret, l’une après l’autre, se frotter les yeux, bâiller, s’étirer et partir, d’un pas ennuyé et traînard, à leur ouvrage. Il va donc falloir travailler ! Au risque de voir leurs foins pourrir, ils eussent préféré peut-être que la pluie tombât, car ils seraient restés à la maison ou bien ils auraient été boire avec les camarades, au cabaret du bourg voisin.