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petite église en ruine dont le clocher menace de s’écrouler. Derrière le pont qui relie la route de Plozévet au village d’Audierne, du haut d’un coteau fermant l’horizon, l’hospitalier château de Loquéran mire sa belle façade dans la rivière de Pontcroix, large ainsi que le Danube, et qui bientôt se perd au tournant des rochers, entre les rives hérissées de sapins noirs et de landes mélancoliques.

Voilà que les marins dévalent des venelles tortueuses qui aboutissent au quai, et chacun se rend à son bateau. Pendant que le petit mousse pompe, on dévide les filets, qu’on empile au fond de la cale, en regardant, de temps en temps, le ciel où courent des nuages chassés par le vent de suroît. Puis les voiles sont hissées, on amène les amarres et les bateaux lentement s’éloignent un par un, au bruit rythmique des avirons, qui luttent contre le courant de la marée montante. La brise souffle plus fort, le ciel se strie de nuages plus sombres, l’eau dans