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matérielles, par conséquent capricieuses et peu solides.

— Et ces raisons, mon cher ministre ?

Aimable – car inépuisable autant que documentée est son amabilité – M. Georges Leygues répondit :

— Après chaque catastrophe semblable, on observe ceci : surveillance plus rigoureuse ; les pompiers présents ; vérification presque quotidienne des rideaux de fer, des grands secours, des calorifères, des contacts électriques, que sais-je ?… toutes choses d’une contingence brutale, avec quoi l’on rassure les esprits grossiers. Allez donc leur parler de lois mystérieuses, de rythmes cosmiques ou autres, aux esprits grossiers ? Ils vous riront au nez. Nous autres, gens de réflexion et d’idéal, qui avons l’habitude des grands pensers, qui savons ce que c’est que les grandes harmonies mondiales, ce qui doit nous rassurer pleinement, quant à l’impossibilité d’un désastre prochain et pareil, c’est, je vous le répète, ses lois, ses rythmes, ses traditions. Or, la tradition – appelez-la du nom que vous voudrez – repousse de toutes ses forces invincibles l’idée immédiate d’un nouvel incendie. L’Odéon, peut-être ?… Et, encore, c’est si loin ! Il ne se trouve pas, certainement pas, dans le champ du rythme en question. Tranquillisez-vous donc, mon cher monsieur. Et pensons à autre chose.

— Voyons, monsieur le ministre, répliquai-je, quand