Vous ai-je dit que mon maître s’appelait le baron Bombyx ? Je m’aperçus tout de suite qu’il était avare et méticuleux. Bien que sa maison se composât d’une gouvernante, d’un valet de chambre et d’une cuisinière, il ne voulut laisser à personne le soin de m’installer. Il me montra l’écurie et la vieille jument blanche, une bête déjà bien lasse et qui tremblait sur ses jambes arquées…
— Elle s’appelle Fidèle… me dit-il… Ho ! ho ! Fidèle… Ho ! ho !
Et lui caressant la croupe, il entra dans le box.
— C’est une bonne jument… elle est très douce… Je l’ai depuis dix-neuf ans… Ho ! Fidèle… n’est-ce pas, Fidèle ?
Fidèle tourna la tête vers son maître et lécha la manche de son pardessus.
— Vous voyez ?… un mouton… Seulement, elle a une manie… elle n’aime pas qu’on l’étrille de droite à gauche… elle veut qu’on l’étrille de gauche à droite… Comme ça, tenez…
Le baron, avec sa main allant et venant sur le ventre de la bête, imitait le mouvement de l’étrille.
— C’est une manie… Il suffit de la connaître… De gauche à droite, vous vous rappellerez ?
J’examinai les jambes de Fidèle, raidies et déformées par des éparvins.
— Elle doit boiter, cette jument-là ? demandai-je.
— Un peu… répondit le baron… elle boite un peu, c’est vrai… Dame, elle n’est plus jeune… Mais