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faux métaux, à organiser de fausses mines, de faux isthmes, de faux charbonnages… Penser perpétuellement à canaliser l’argent des autres vers mes coffres, à m’enrichir de la ruine lente et progressive de mes clients, grâce à la vertu d’éblouissants prospectus et à la légalité de combinaisons extorsives, me fut une opération inacceptable, à laquelle se refusa mon esprit scrupuleux et ennemi du mensonge… Je pensai alors au journalisme… Il ne me fallut pas un mois pour me convaincre que, à moins de se livrer à des chantages pénibles et compliqués, le journalisme ne nourrit pas son homme… Et puis, vraiment, j’étais exposé quotidiennement à des contrats trop salissants. Quand je pense que les journaux, aujourd’hui, ne sont fondés que par des commerçants faillis ou des financiers tarés, qui croient – et qui d’ailleurs y réussissent – éviter ainsi de finir leurs jours dans les maisons centrales et dans les bagnes… non, vraiment, je ne pus me faire à cette idée. Sans compter qu’il est fort pénible à des personnes comme moi, qui possèdent une certaine culture, d’être l’esclave de sots ignorants et grossiers dont la plupart ne savent ni lire, ni écrire, sinon leurs signatures, au bas d’ignobles quittances… Alors j’essayai de la politique…

Ici, je ne pus m’empêcher de pousser un rire sonore qui menaça de s’éterniser…

— C’est cela, approuva le séduisant gentleman… N’en disons pas autre chose… Je pensai ensuite