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encore… et que les voitures maintenant prenaient la proportion de voitures de sacre. Le marquis poursuivit, sur un ton confidentiel :

— Elles ont eu l’honneur… Il y a cinq mois… d’aller chercher et de reconduire au Havre… M. le duc d’Orléans… Chut… sacristi !… M. le duc d’Orléans, qui voulut bien venir, dans le plus grand secret, passer quelques jours chez moi.

De plus en plus étonné… étonné jusqu’à l’affolement, Chomassus bégayait :

— M. le duc d’Orléans ?… Ah ! par exemple !… M. le duc d’Orléans ?… Ainsi !

— Parfaitement, mon cher… lui-même… Je vous présenterai quand il reviendra… Mais pas un mot !…

— Oh ! monsieur le marquis.

— Et savez-vous ce qu’il m’a dit, M. le duc d’Orléans ?… Il m’a dit : « Je suis tellement content de vos magnifiques voitures, mon cher marquis, que je n’en veux point d’autres, lorsque je rentrerai parmi mon peuple… » Et savez-vous ce que j’ai répondu à M. le duc d’Orléans ?… Je lui ai répondu : « Monseigneur… ce serait pour mes voitures un honneur éternel… mais vous ne pouvez pas faire cela… Ce n’est pas en voiture que vous devez rentrer parmi votre peuple… c’est à cheval, Monseigneur… à cheval !… » C’est bien aussi votre sentiment, Chomassus ?

— Parfaitement… parfaitement…, monsieur le marquis… À cheval… évidemment…

— Parbleu… j’en étais sûr…