une parade de théâtre. J’ai peur qu’il n’y ait rien derrière ce décor extravagant et bariolé. Et je ne sais si je dois m’en réjouir.
« En rentrant, cet après-midi, à mon hôtel, par un des faubourgs de la ville, j’ai aperçu assis sur une borne de pierre, à l’angle d’une rue, un très vieux juif. Le nez crochu la barbe en fourche, l’œil miteux, couvert de guenilles puantes, et, malgré tout cela, très beau, il chauffait, au soleil, sa carcasse décriée… Un officier passa, qui traînait sur la chaussée un grand sabre. Voyant le juif, il s’arrêta près de lui et, sans aucune provocation de celui-ci, par une simple distraction de brute, il se mit à l’insulter… Le vieux juif ne semblait pas l’entendre. Furieux de cette inertie qui n’était pas de la peur, pas même du dédain, l’officier souffleta le vieillard, de sa main gantée, avec une telle force que le pauvre diable fut projeté de sa borne sur le sol où il gigota, ainsi qu’un lièvre atteint d’un coup de feu. Quelques passants, bientôt une foule, s’étaient attroupés, heureux de l’aventure, autour du juif tombé, et ils disaient : « Hou ! hou ! », et ils lui donnaient des coups de pied, et ils lui crachaient dans sa barbe, ignoblement. Le juif se releva avec beaucoup de peine, étant très vieux, plus débile qu’un petit enfant, et, sans nulle colère dans ses yeux qui n’exprimaient que de la stupéfaction devant un acte d’une si inexplicable, d’une si illogique brutalité, il dit : « Pourquoi me bats-tu ?… T’ai-je fait