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il détendit ses piquants, risqua son museau, allongea à demi le corps, ouvrit ses deux petits yeux noirs, féroces et ricaneurs, sortit ses pattes. Puis, quand il se fut bien rendu compte que la vipère était morte, il l’avala, en groïnant, comme un porc. Après quoi, lourdaud, repu, il se traîna sur ses pattes courtes, et, fouillant la terre du groin, il se roula en boule, sur un tas de feuilles parmi lesquelles il disparut…

Au retour, Robert, qui n’avait pris aucun plaisir au récit du combat de la vipère contre le hérisson, m’étourdit d’histoires de femmes, de jeu, de chevaux. Je ne l’écoutais pas… Comme nous étions à quelque cent mètres de la ville, il me tira par le bras, et il me dit, en me désignant une jolie maison, bien placée à mi-côte, parmi des terrasses et de somptueux jardins :

— Tu connais ?

— Non…

— Mais, c’est la villa hantée, mon vieux… Comment tu ne connais pas ?… Une histoire épatante… Voici comment je l’ai apprise.

Et mon ami conta :


« Il y a deux ans, je voulais louer une villa ici… On me conseilla de m’adresser à l’un des notaires, maître Claude Barbot, qui en possédait quatre, les quatre plus belles et les mieux situées du