une toute petite âme, une âmelette, une âme de mouche, taquine, chatouilleuse et vibrante, qui voletait sans cesse, en zigzags, autour de moi, et se cognait partout, avec des cris, des rires, à rendre fou.
« Laure était ma sixième épouse… Oui, ma sixième, en vérité ! Deux étaient mortes, je ne sais pourquoi ; les autres m’avaient quitté, un beau soir… Pourquoi ? je n’en sais rien non plus. Et ce que j’ignore plus encore, c’est la raison secrète et défavorable qui me poussa, impérieusement, à ce mariage, car je connaissais à l’avance ce qui m’y attendait.
« Ma vie, monsieur, est un tissu, si j’ose dire, de contradictions… J’ai le sentiment que je suis l’être le plus accommodant du monde, à qui sont inconnues les bouderies, les taquineries, les mauvaises humeurs. Je n’ai de volonté, d’énergie, que pour plaire à qui m’entoure. Si déraisonnables soient-ils, je me plie à tous les caprices. Jamais une plainte, une dispute, une préférence, un ordre. Je me sacrifie – au point de m’annihiler complètement, d’imposer silence à mes désirs, à mes goûts – à ce que je crois être le bonheur de qui vit avec moi. Eh bien, malgré cette persistance héroïque dans l’effacement, il m’est impossible de garder une femme plus de trois mois. Au bout de trois mois, brunes ou blondes, petites ou grandes, corpulentes ou diaphanes, je les fatigue tellement, elles arrivent à me détester tant, que fuut !… fuut !…