Page:Mirbeau - Les Deux Amants, paru dans l’Écho de Paris, 13 octobre 1890.djvu/12

Cette page a été validée par deux contributeurs.

L’Amant (tendre et triste)

Ma bien aimée !… Oui ! tu as raison… (Baisers)… Je t’aimerai, va !… je t’aimerai comme tu veux être aimée… Je…

L’Amante

Bien souvent, quand tu parles d’un poète et que tes yeux s’allument… et ton enthousiasme ! alors je suis jalouse… jalouse de n’être pas tout pour toi… Comprends-tu ?

L’Amant

Ma bien aimée… oui… oui… je comprends… (Silence, baisers).

L’Amante

Et puis, je suis sûre que tu me crois inintelligente, que tu me crois bête.

L’Amant

Oh ! Oh ! Comment peux-tu… toi !…

L’Amante

Si… Si… tu me crois bête… Je le vois bien… Avec tes amis, tu parles, tu parles… Avec moi, tu ne dis jamais rien… Tu t’imagines que je ne suis pas capable de comprendre les grandes choses… C’est à peine si tu me réponds, lorsque je t’interroge sur des grandes choses… Cela m’humilie, comprends-tu ?

L’Amant

Ma bien aimée !…

L’Amante

Est-ce que tu me crois bête ?

L’Amant

Tiens !… (Il l’embrasse longuement)