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Je pourrais multiplier de tels exemples. Ils abondent en surprises délicieuses, dans l’œuvre de M. de Montesquiou.

Et je m’aperçois que je n’ai rien dit de cette œuvre, si variée, ni de ce qu’elle contient d’émotion, comme dans ce poème admirable : Laus Noctis, où chaque strophe s’exalte, s’enfle et monte, portée vers le ciel, ainsi qu’une prière dans un chant d’orgue, ni de ce qu’elle contient de tragique comme cette shakespearienne rencontre, au palais de Saint-Cloud, des deux veuves ennemies et douloureuses, l’impératrice Frédéric et l’impératrice Eugénie ; ni des pensées fortes, des données délicieuses, des impressions rares, parfois spécieuses, et qui s’illuminent à la clarté d’un style nombreux, musical et très personnel. Mais que peut-on dire, dans un article ? Et, d’ailleurs, à quoi cela sert-il ?

Je ne saurais mieux terminer cet inutile verbiage qu’en reproduisant la lettre par laquelle M. Leconte de Lisle saluait l’apparition des Chauves-Souris.

« Vos poésies sont d’un art très subtil et très délicat. J’en ai goûté le charme étrange avec une surprise toujours nouvelle et on ne peut plus sympathique.

« Sans doute, elles ne s’adressent qu’à une élite de rares esprits ; mais il convient qu’il en soit ainsi d’une œuvre essentiellement originale, à laquelle je suis heureux d’applaudir ».