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et d’autant plus active, qu’elle était plus maîtresse d’elle-même, plus lucide et plus raisonnante. C’est que personne, comme M. Paul Hervieu, ne connaît les ressorts de l’âme humaine ; personne ne s’est davantage penché au bord de ce gouffre, qui est le front d’un homme, personne ne s’est plus aventuré sur cette mer de joies et d’illusions qu’est la prunelle d’une femme, et personne n’a davantage rapporté, de ces voyages, des sensations poignantes de cet infini et de ce mystère qu’est la vie.

On a reproché à M. Paul Hervieu de n’avoir pas su résister à la maladie littéraire du moment, et qu’on appelle le snobisme. C’est là une grande injustice. Je cherche vainement dans toute son œuvre une seule phrase qui me le montre atteint de ce travers, de ce ridicule, où sombrèrent quelques talents notoires, qui promettaient mieux que de s’émerveiller aux livrées des valets de pied et aux bottines des clubmen. Je trouve, au contraire, que M. Paul Hervieu s’est constamment gardé de ce défaut, qui n’a de prise, d’ailleurs, que sur les petites âmes, mal défendues par de petits cerveaux. M. Paul Hervieu ne peint point ce qu’on appelle des milieux ; il n’inventorie pas les salons, les chambres à coucher. Tout ce détail descriptif, il le simplifie, non pas jusqu’à l’effacement,