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brants. La moindre vétille prend, avec eux, aussitôt, des proportions considérables ; d’un fétu de paille ils font un canon de marine. Combien ne nous irritent-ils pas, tous les ans, avec leurs salons, leurs jurys, leur médaille d’honneur. Pourtant, il est probable — c’était tellement simple — que si M. Déroulède n’était intervenu au débat, avec cette discrétion qu’on lui connaît, les choses se seraient passées, cette fois, le plus honnêtement du monde. Mais quoi, le tapage était amorcé, l’occasion était unique de se donner encore en spectacle. Ils en ont profité avec joie. Les uns après les autres, ils ont tenu à affirmer, ceux-ci par leur patriotisme, ceux-là par leur philosophie, à nous confier un tas de choses oiseuses, qu’on ne leur demandait pas et qui ne sauraient nous intéresser.

En quoi, vraiment, mon honneur de Français est-il engagé par ce fait que les peintres exposeront ou n’exposeront pas à Paris ? En quoi aussi le triomphe artistique de la France est-il compromis par une abstention ? Mais tous les peintres, nous les connaissons ; nous en avons l’oreille rebattue de leurs noms, de leurs œuvres, de leurs récompenses, de leur luxe, de leur gloire. Leurs salons, ah oui, je les connais ; ces grandes halles commerciales, ces grandes boutiques, ces grands bazars où s’étalent tant de hideurs, tant de médiocrités, tant de camelote … Tenez, chaque année, au Palais de l’Industrie, on fait une exposition gastronomique. Il y a de tout, dans cette exposition, des