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taines images, nous semblent, en somme, d’assez fâcheuses brutes. Et je crois qu’il serait temps de prendre contre l’héroïsme qui, à bien le regarder, n’a été, dans l’histoire, que la forme légitimée, exaltée, du banditisme, et contre ses écarts sociaux, d’impérieuses mesures de préservation.

Maintenant que l’émotion produite par les événements que l’on sait est tout à fait calmée, on en peut parler, je pense, avec toute l’irrévérence que ces événements comportent. Ce qui m’a le plus frappé, c’est le rôle que la presse, les peintres, les donneurs d’avis qui n’ont point manqué dans cette inconcevable affaire, attribuèrent si bénévolement à l’opinion publique. Durant ces quinze jours d’agitation, il ne fut question que de l’opinion publique. Jamais on ne s’y était autant référé ; tout le monde s’y référait, pour et contre. L’opinion publique voulait ceci, elle ne voulait pas cela. L’opinion publique était blessée par M. Detaille et satisfaite par M. Puvis de Chavannes, que nous eussions voulu voir planant au-dessus de toutes ces mesquines querelles : elle marchait avec M. Roll et tournait le dos à M. Bonnat. M. Tony Robert-Fleury l’invoquait, propice, aussi bien que M. Montenard, hostile. Or, je tentai de savoir ce que c’est que l’opinion publique, où elle réside et par quoi elle se manifeste. Je m’adressai à des personnes que je pris le soin de choisir différentes de classe, de mœurs,