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de la verdure, l’homme important s’arrêta, contempla la maison d’un regard mélancolique et qui me sembla plein de regrets. Puis, poussant un soupir, il me dit :

— Tenez, c’est là qu’habitait M. Caro.

D’abord, je fus assez intrigué. Et, à mon tour je regardai la maison. Elle était vénérable et charmante, cette rustique demeure, avec son petit jardin, ses vieilles fenêtres, son vieux pignon angulaire, ses vieux murs tapissés de lierre et de plantes grimpeuses. Elle avait un si bon air de paix intérieure, de joie familiale, il y avait autour d’elle tant de silence, tant de solitude douce, elle exprimait, sous ses très anciennes pierres, une vie si naïve, si édénique, que mon âme, soudain attendrie, fut conquise à de bucoliques extases. Et, pour compléter le tableau, non loin de la porte, familière et biblique, une chèvre, attachée à un piquet, toute blanche, paissait l’herbe haute.

Et, malgré moi, je trouvai que ce nom de Caro, prononcé dans un tel paysage, avait comme une résonance fausse.

L’homme important répondit un peu sèchement :

— Comment, quel Caro ? … Y en a-t-il tant que ça, des Caro ? … Vous ne connaissez pas M. Caro ? … M. Caro, qui était professeur de philosophie, qui parlait si bien, et dont on parlait tant à Paris dans les journaux ? …

— Si… si, rectifiai-je… Ce Caro-là, je le connais