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pour un capitaine —, ni dans l’humour, car l’humour garde souvent un arrière-goût de tristesse amère et de désenchantement, qu’un homme vraiment gai doit savoir éviter. Et puis ce livre arrive à son heure. Bien que, fils d’une époque barbare, nous soyons élevés dans des écoles où l’enseignement de la haine nationale s’appelle éducation civique, nous commençons à nous demander ce que nous veut la guerre, ce que nous coûtent ses défaites, ce que nous coûtent même ses victoires, et pourquoi il faut que les frontières qui séparent les hommes soient toujours marquées d’un trait de pourpre rouge, hérissées de fer et fermées par les canons.

Un instinctif sentiment de révolte, entretenu par les littérateurs et les philosophes libres, entre dans nos âmes contre les brigandages des pasteurs de peuples, et des millions d’êtres humains, las de donner leur vie pour des combinaisons territoriales, diplomatiques ou financières, auxquelles ils ne comprennent rien, pousse ce cri : « La paix, le désarmement ! Nous voulons travailler, nous voulons aimer, nous voulons vivre ! » Évidemment c’est là un dangereux symptôme de mélancolie, et ces pauvres gens n’entendent rien à la gaîté. Le capitaine Driant veut que nous soyons gais, et c’est pour réagir contre les dangers de notre tristesse, qui nous emporte vers des rêves d’humanité idéale, qu’il a écrit la captivante : Guerre de demain.