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s’élevait vers des mondes que je n’avais ni entrevus, ni soupçonnés, et dont vous m’ouvriez les horizons de lumière. Et devant la constatation de mon infériorité, non seulement je n’éprouvais pas d’amertume, c’était au contraire une reconnaissance pour tout ce que vous mettiez en moi de choses nouvelles et belles, de frissons inconnus, de résolutions enthousiastes, c’était surtout une fierté de vous aimer, et d’être aimé de vous… Et vos projets ?… Est-il possible que tout cela soit fini, et que vous soyez mort ?



Émile Hennequin meurt sans laisser l’œuvre magistrale et définitive qu’il rêvait, et pour l’accomplissement de laquelle, chaque jour, avec fièvre, avec passion, il amassait des matériaux, prodiges d’investigation scientifique, d’observation humaine et de sensations esthétiques. Toutefois, il laisse assez de belles études, les unes déjà publiées, les autres qui le seront bientôt par les soins de ses amis, pour justifier l’enthousiasme qu’il avait su exciter autour de lui et toutes les espérances — hier encore des certitudes — que nous fondions en lui et que son affreuse mort vient de briser. Ce sont de remarquables pages de critiques parues dans la Revue contemporaine de M. Édouard Rod, dans la Revue indépendante, dans la Nouvelle revue, où l’on était bien un peu surpris de voir ce fier