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qu’une mascarade de pantins, si colorée soit-elle. Dans le peuple qui, jadis, se réjouissait à ces contes improbables, et qui était resté le dernier liseur d’Alexandre Dumas, on ne veut plus entendre parler de lui. Et la preuve est la mathématique, irréfutable. Un petit journal de reproductions littéraires, qui ne publiait que des romans d’aventures — dont beaucoup d’Alexandre Dumas — végétait tirant à trente mille exemplaires. Il eut l’idée d’abandonner ce genre vieilli, qui ne dit plus rien à l’esprit de personne ; il reproduisit Balzac, Daudet, Goncourt, Zola, et, en l’espace de deux mois, son tirage atteignait le chiffre de cent cinquante mille.

Je ne sais pas si cette littérature, si cette invraisemblable caricature de l’histoire et de la vie ont jamais amusé nos pères. Ils disent que oui. Je veux le croire. Ce que je sais, c’est qu’elles n’amusent même plus nos concierges. Et les critiques qui veulent ressusciter, en présence du mouvement qui emporte l’art vers des spéculations plus hautes, ces admirations mortes, ce vieux misérable passé aboli, me font l’effet de ces bonshommes de province qui passent leur temps à regretter les anciens coches et les diligences, et s’entêtent à ne plus voyager pour protester contre les chemins de fer.

Quant à vous, monsieur Hector Pessard, vous me copierez cent fois la Dame de Montsoreau… et vous viendrez nous parler après de M. Alexandre Dumas père.