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sacré aujourd’hui, même M. Floquet, cet ancien Polonais, devenu plus moscovite que Rostopchine.

En revanche, tous n’ont exprimé que des enthousiasmes pour la Jeunesse des Mousquetaires de M. Alexandre Dumas, père. Ah ! voilà une pièce, et voilà un roman. Parlez-leur de ça. Quelle magie, quelle gaieté, quelle honnêteté, quel prodigieux entrain, quelle histoire, quel style aussi ! Quelle jeunesse surtout, quelle merveilleuse jeunesse ! Des coups d’épée, des manteaux flottants, et des lampées à même les brocs d’étain, et des bottes qui résonnent, et Bonacieux… non, mais Bonacieux… Et Planchet… non, mais Planchet… Et pas de psychologie : et pas d’art, et rien… rien… C’est le rêve… Un tout récent critique, à peine sorti des limbes des premiers Paris et des entrefilets ministériels, s’est fait remarquer par son emballement. Il a dit, dans un accès de généreuse éloquence :

— Assez de toutes les saletés du roman d’analyse ; assez de la boue dont les naturalistes, sous prétexte de vérité, nous éclaboussent chaque jour… Silence à Stendhal, à Balzac, à Goncourt, à Daudet, à Zola… Allez-vous-en, vous qui voyez, qui sentez, qui pensez…

Et s’adressant aux Français, il ajoute :

— Voulez-vous reconquérir votre foi, votre jeunesse, l’amour de la patrie, tous les senti-