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sait donc avec quelle sympathie j’avais accueilli cette nouveauté. Mais la sympathie devint vite de l’enthousiasme. Et combien s’accroît, aujourd’hui, cet enthousiasme, lorsqu’il m’est donné de constater à quel point de perfection réalisée M. A. Hamon a pu hausser cette tentative dont la portée sociale est incalculable, et la trajectoire, à travers la bi-mentalité universelle, reste malheureusement inobservable encore, comme tant de choses.

Avec un sens très exact des contingences et un flair de psychologue supérieurement doué, M. A. Hamon, amplifiant sa méthode et généralisant sa conception de la littérature, s’adresse, cette fois, à une catégorie de citoyens, naturellement bavards, incroyablement vaniteux et pour qui, parler de soi constitue, sinon la seule raison d’être, du moins la préoccupation favorite. Si tous les artistes et scientistes sollicités répondent aux cent vingt-huit questions de MM. A. Hamon et René Ghil, ces derniers ont, désormais, leur vie durant, des volumes tout faits sur la planche… La statistique nous apprend, en effet, qu’il existe, rien qu’en France et dans la principauté de Monaco, quatre cent quatre mille peintres, sans en excepter M. Carolus-Duran ; dix-huit mille neuf cent douze sculpteurs ; six cent trente mille musiciens ; un million de poètes et quatorze millions de romanciers, les divers scientistes désignés par M. A. Hamon, y compris les photographes, les