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légère et caressante, mais d’un cœur ferme, il s’avance à travers les obscurités de la conscience humaine, et fait la lumière dans les profondeurs de nous-mêmes… livre d’un visionnaire que le mystère attire et inquiète, que la nature émerveille et que passionne la vérité… Il vient s’ajouter glorieusement à ces livres déjà glorieux : le Trésor des humbles, Sagesse et destinée, et cette miraculeuse Vie des abeilles, où le miracle est que la science la plus stricte et la plus scrupuleuse observation du naturaliste aient, pour une fois, emprunté la forme et le langage de la poésie la plus haute !…

Nous aurons, mercredi, au théâtre de l’Opéra-Comique, Pelléas et Mélisande, une légende belle et triste, comme celle de Paolo et de Francesca, un poème d’un accent lyrique si nouveau, si émouvant et si simple, que M. Debussy paraphrase en une adorable musique, et que M. Albert Carré encadre dans une mise en scène où il est impossible d’allier à plus de pittoresque et à plus d’art la compréhension et le respect d’une œuvre… deux fois chef-d’œuvre !… J’ai pu assister à une répétition de Pelléas et Mélisande et, après trois jours, j’en garde une impression bouleversante… comme d’une hantise j’en garde aussi une lumière, très vive et très douce, et qui, loin de se dissiper, entre en moi, à chaque minute, davantage, me baigne, me pénètre… Maurice Maeterlinck permettra t-il à mon amitié, jalouse de son bonheur autant que de sa gloire,