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sinos d’Ostende et de Spa, au contact de mashers bruxellois et des gommeux d’Aix-la-Chapelle, qui rendent si élégants et si enchanteurs ces paysages de la roulette et ces grèves de la galanterie… Je ne pourrai plus aller à Bruges, dont j’aime le silence, les eaux mortes, les vieilles pierres et les mélancoliques carillons ! Qui m’eût dit que Bruges me serait, un jour, si cruel ? Ô cher petit hôpital Saint-Jean, où, tant de fois, dans tes salles et sous tes cloîtres, je suis venu chercher l’extase aux divines toiles de Meinling ?… Qui m’eût dit, ô cimetière, moins mort que le sépulcre des rues, des canaux et des béguinages, moins noir que les ombres qui passent et que les cœurs de vieilles femmes, dont on voit les visages de cire derrière les transparents de dentelles, joli cimetière fleuri comme jardin de vie, qui m’eût dit que je ne pourrai pas, l’année prochaine, porter à ce tendre et charmant ami que fut Georges Rodenbach le pieux hommage de mon amitié fidèle, et le culte fervent et les fleurs vivaces de mon souvenir ?… Et je ne marcherai plus, dans les plaines de l’Escaut où hurle la tempête de tes vents, ô Verhaheren !… Et je ne me promènerai plus à Gand, le long de ces canaux tragiques dont l’eau noire, reflète la pâleur des malades, aux fenêtres des hôpitaux, ô cher Maeterlinck !…

Hôpital !… Hôpital !… au bord du canal !…

Et je ne verrai plus ta maison si hospitalière,