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pulser de notre organisme, et qui nous dit que nous ne les expulsions pas pour nous refaire une force et une joie toutes neuves ?… D’ailleurs, maladie du doute : nous n’y pouvons rien, puisque c’est de l’histoire qui, plus forte que nos volontés, par-dessus nos vertus ou nos crimes, fermente et bouillonne en nos profondeurs !

Malgré les préoccupations invincibles de ce tragique moment, et par un effort, par un prodige d’avoir pu m’abstraire de leurs hantises, j’ai pu lire trois livres, ce qui, depuis des mois et des mois, ne m’était arrivé. Il est vrai que ces livres sont des livres choisis, et que leurs auteurs me sont des amis, amis de mon amitié, et amis de mon esprit. Le Mauvais désir, de M. Lucien Muhlfeld, l’Holocauste, de M. Ernest La Jeunesse, Sagesse et destinée, de ce moderne Marc Aurèle, qu’on appelle Maurice Maeterlinck.

Suivant l’ordre des dates, je ne parlerai aujourd’hui que du Mauvais désir. Les deux autres que j’aime, l’Holocauste pour sa sensibilité aiguë et son lyrisme passionné, Sagesse et destinée pour la vive, calme et pacifiante lumière qui allume dans les âmes, viendront ensuite. Ce sont trois livres braves que je loue d’avoir affronté l’hostilité du moment et quelque chose de plus terrible, l’inattention. Et je leur suis infiniment reconnaissant à ces trois œuvres, non seulement de leurs beautés personnelles et